Le symbolisme et ses conséquences dans les apparitions ovnis

 
 
Publié par Eric Zurcher
L’irruption d’une composante psychique et symbolique
A la fin des années 50, le psychanalyste C.G. Jung avait suspecté des arrières plans symboliques dans les visions de soucoupes volantes, mais il s’agissait surtout d’observations effectuées à longue distance. C’est dans les années 70 que ce précisa ce nouveau paramètre  essentiellement fondé sur les observations rapprochées. Ces constats opérés par l’ufologie française aboutirent à un véritable bouleversement des concepts traditionnels, qui voyaient les ovnis comme des objets purement matériels émanant d’une intelligence extraterrestre nous visitant. Les problèmes nouvellement posés étaient d’une complexité extrême et appelaient de nombreuses interprétations, pour la plupart invérifiables. Ces problématiques ne sont toujours pas solutionnées à l’heure actuelle, et rien ne dit qu’elles puissent l’être à brève échéance.
L’émergence d’un lien de nature psychique entre un observateur et la manifestation d’un phénomène ovni est ce qu’il y a de plus intrigant ; On pourrait en conclure que la proximité d’un ovni influe sur la conscience du témoin et la modifie. Mais il existe aussi de nombreux cas où au travers d’un groupe de deux ou trois observateurs, le contenu rapporté a mis en évidence un lien avec la culture humaine au sens large. On a parlé à l’époque d’une composante psychique incompréhensible, de mimétisme, d’un arrière-plan anthropologique ou transculturel sous-jacent aux manifestations, etc. On ne citera pas ici de cas à titre d’exemple mais il en existe des milliers sur la planète et la plupart des ufologues savent de quoi il s’agit. Jacques Vallée avait parfaitement résumé le problème il y a plus de trente ans : Le phénomène ovni comporte des éléments humains mais en même temps il nous paraît étranger. Il est en apparence physique et pourtant il se présente comme une projection de l’inconscient du témoin. (J.Vallée, OVNI, la grande manipulation, le Rocher 1983).
Le symbolisme est aussi question d’interprétation bien qu’il puisse, à la réflexion, correspondre à un langage véritablement universel.  Cette dimension n’est pas totale (rien ne l’est en ufologie) mais représente une tendance forte dont les implications ont été immenses et très déstabilisantes en termes d’interprétations. Elles ont signifié que certains témoignages ne correspondaient pas du tout aux conceptions classiques.
L’impact réducteur a été impressionnant, induit par la nature sémantique de récits, combinant des contenus absurdes, oniriques et fortement symboliques. Sous cet angle, il devenait évident que le principe d’économie, en tant que base fondamentale de l’épistémologie, tenait la corde et pointait « l’hypothèse nulle » au grand soulagement du monde scientifique.
Hormis cette posture réductionniste, d’autres voies furent évoquées mais elles se heurtèrent rapidement aux limitations du cadre anthropologique, autrement dit à l’absence de concepts et d’outils analytique performants à l’intérieur du paradigme en vigueur. Une autre façon de l’exprimer est de considérer ce phénomène comme totalement incommensurable. Un postulat très probable bien qu’un peu désespérant.
 
Quelle interprétation dans le cadre de l’hypothèse extraterrestre ?
Une des possibilités partait de l’idée suivante : nous nous trouvions peut-être en présence d’une intelligence se manifestant subtilement par le biais de nos propres structures mentales ; un passage obligé et permettant d’éviter une incompréhension définitive des signaux émis. Cette hypothèse était intéressante à deux niveaux. Le premier par sa compatibilité avec l’H.E.T qui se voyait transposée à un second degré, d’une nature infiniment plus complexe que perçue à l’origine. Dans ce court texte, nous examinerons  uniquement cette voie, ainsi que diverses conséquences qui lui sont attachées.
Le second par l’introduction d’une dimension sémiologique, c’est-à-dire d’un sens véhiculé par des signaux à haute complexité ; ici des scénarios intimement adaptés aux témoins et à leur culture (donc reconnaissables malgré leur étrangeté) et véhiculant un sens symboliquement orienté (l’espace, le merveilleux technologique, la vie extraterrestre, etc.).
Cette conception, récemment reprise par le physicien Eric Davis, possédait un côté séduisant malgré des contre-arguments évidents. Outre la difficulté à identifier avec certitude le signifié en filigrane de ces messages multiples, il était évident qu’une intelligence de ce niveau devait disposer a priori de moyens bien plus simples et efficaces : pulser régulièrement sur le temps long (vagues rythmiques) ; se produire de manière plus ostentatoire, ou multiplier des scénarios complexes absolument identiques sur la forme.
Or nous n’avons jamais rien observé de tel dans la profondeur historique, sauf une exception pour le dernier exemple.
Idem pour les très discutés enlèvements, qui reposent sur une structuration relativement cohérente mais dont la forme est chaque fois différente. La problématique posée par ces évènements, réels ou non, n’est pas de savoir ce qu’ils représentent. Cela, on le sait depuis la fin des années 70 grâce aux travaux des chercheurs français, notamment de Jean Giraud : tout indique qu’il s’agit de régressions infantiles à forme symboliquement orientée (nous y revoilà !). Une constante chez beaucoup d’espèces animales, parfaitement connue des traditions humaines pour ses effets cathartiques, ainsi que par beaucoup de spécialistes du comportement animal. La véritable question serait : pourquoi l’interaction rapprochée avec un phénomène ovni conduirait à ce type d’expériences ? Une problématique dont découlent beaucoup d’autres questions par un effet en cascade.
Pour stimulante que soit cette théorie ses signaux, il nous faut donc là encore basculer sur une interprétation au second degré. Toutefois, cette montée en puissance de la complexité n’est pas sans présenter de grands dangers. Elle conduit à postuler que ces manifestations ne sont pas du tout des signaux ou des messages au sens où nous l’entendons, mais qu’ils participent d’une entreprise imperceptible visant à influencer l’espèce humaine sur le temps long. Une sorte de système de contrôle donc, tel que Jacques Vallée l’avait évoqué au milieu des années 70. Les choses sont sans doute bien plus compliquées encore.
 
Cherchez le mobile…
A ce stade, nous ne pouvons qu’imaginer les motifs sous-tendant une telle activité. Par exemple, une forme d’eschatologie (dans une forme intégralement laïcisée) serait sans doute une option crédible, parce qu’elle est la seule reposant sur des faits que nous pouvons mesurer chaque jour : le désastre environnemental qui s’accélère.
Mais dans l’ordre des concepts, le danger ne réside pas là ; il est bel et bien dans la dimension téléologique d’un tel constat. Cela signifierait que les finalités de l’espèce humaine ne seraient pas déterminées par ses propres choix, mâtinés de ce que nous nommons « hasard », ainsi qu’à certaines formes de déterminisme dans la trame causale.
On voit immédiatement les problèmes qu’une telle interprétation peut soulever.
Si l’eschatologie est d’essence religieuse par ses origines et son implication dans le temps, la téléologie a souvent hanté les historiens, même les plus grands, à commencer par Arnold Toynbee au XX° siècle. Il est vrai que cet auteur était Chrétien et écrivait avant le grand Désenchantement du monde !
Ces deux notions impactent également, mais de manière invisible, tout le mouvement ufologique ainsi qu’un vaste public intéressé. Par leurs conséquences, elles ne peuvent que générer, souvent à bas bruit, toutes sortes de dérives et croyances plus ou moins sectaires, qui finissent généralement en conspirationnisme aigu, voire en loufoqueries qui s’apparentent à une forme de folie douce. Comme l’indique le temps écoulé depuis la seconde guerre mondiale, nul n’est à l’abri de ces dérives, et surtout pas ceux dotés d’intelligence et de culture.
Il n’existe que peu de remèdes face à cette situation, hors l’esprit critique au sens pascalien du terme : chercher la vérité quelle qu’elle soit, tout en faisant preuve de la plus extrême prudence.
Mais cette voie n’est en rien facile tant elle consiste à marcher en funambule sur le fil d’un rasoir.
L’ufologie mène à ces problématiques inconfortables, lesquelles sont engendrées par ses caractéristiques qui paraissent dépourvues de tout lien de cohérence à l’intérieur de notre paradigme. Comme une autre caractéristique (l’élusivité) met également en jeu notre idée du libre arbitre humain ainsi que nos conceptions de la réalité, de l’univers-temps et de la conscience, le tout aboutit à une logique véritablement binaire. Le phénomène n’existe pas et le paradigme est sauvé ; il existe, mais alors il faut en tirer les conséquences : le paradigme est très largement insuffisant, sinon totalement biaisé.
Cela veut dire qu’il n’y aura jamais de compréhension de ce phénomène sans rupture épistémologique forte, et c’est peut-être bien cela que vise, à bas bruit, cette intelligence sur le temps long.
 

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